Le 14 juin, date symbolique de la lutte pour l’égalité des genres en Suisse, Surgir a organisé un atelier destiné aux enfants et adolescent·e·s, avec pour objectif de repousser les limites imposées par les stéréotypes de genre. Notre proposition était d’offrir, à travers le dessin, un espace pour rêver en toute liberté. 

Pendant plus de trois heures, entouré·e·s des stands de la Grève féministe et de personnes désireuses de penser un monde égalitaire pour tou·te·s, Surgir a déployé tables, tapis, coussins, feuilles blanches, stylos et bandes dessinées. Dans un espace destiné aux enfants, ou à celles et ceux qui l’ont été un jour, nous avons accueilli une vingtaine d’esprits créatif·ve·s prêt·e·s à dessiner, et un nombre incalculable de curieux ·euse·s venu·e·s observer, écouter ou simplement se blottir avec une BD. De la plus jeune imagination à la plus sage, notre stand est devenu un lieu de rencontre entre super-personnages défiant tous les stéréotypes imposés.

Accompagné·e·s de l’illustratrice Catherine Nachbar, les petit·e·s dessinateur·ice·s se sont lancé·e·s dans les défis que nous leur avions proposés. D’abord, il s’agissait de travailler en équipe pour faire émerger un personnage et décider collectivement de qui iel était, de ce qu’iel faisait dans la vie et, bien évidemment, de son genre. Cet exercice a permis de s’apprivoiser et d’introduire une discussion autour de ce qu’est le genre et de ce que sont les stéréotypes. 

Pourquoi est-il si facile et attrayant de les utiliser, de les mobiliser et de les dessiner, alors même que la réalité est cent fois plus riche que ce que les normes nous imposent ? 
Pourquoi dire que c’est un garçon ? Parce qu’iel a les cheveux courts ? 
Alors ça veut dire que tous les garçons ont les cheveux courts et toutes les filles les cheveux longs ? 
Non, mon grand frère a les cheveux longs et ma mère les cheveux courts. 

Mais alors, comment sait-on qui est quoi ? Est-ce important de toujours classer les gens selon ces deux catégories ? Et si iels ne sont pas d’accord avec la façon dont on les range dans une case, que se passe-t-il ? Avec nos deux animatrices expertes sur les questions de genre, les enfants se sont penché·e·s sur ces interrogations et ont cherché à comprendre comment se détacher des stéréotypes. Puis, retour au dessin. 

À ce moment-là, les participant·e·s avaient deux options pour remettre en question les stéréotypes de genre, simplement mais concrètement : 

  1. Créer une super-personne — un être incroyable, parfois fort·e, parfois vulnérable, parfois seul·e, parfois accompagné·e, mais toujours exempt de stéréotypes de genre. 
  1. Imaginer une très courte bande dessinée autour d’un stéréotype de genre — pour l’illustrer, le dénoncer, en rire ou en témoigner. 

Elisab, Syloa, Electroman, Anti-Pollu Girl… Nous avons eu la chance de voir émerger des dizaines de super-personnages, certain·e·s prêt·e·s à sauver le monde en chassant la pollution, d’autres capables de voler très bas et très doucement pour observer les papillons sans les effrayer. Avec un peu d’encouragement, les plus jeunes se sont facilement laissé·e·s emporter par leur imagination, laissant derrière elleux les contraintes des normes. Pour les plus âgé·e·s, la tâche fut plus complexe : il n’est pas facile de se débarrasser d’injonctions, même quand on sait qu’elles existent. 

Avec celles et ceux qui le souhaitaient, nous avons pris le temps de discuter encore. Catherine nous a aidé·e·s à comprendre que le dessin n’est un espace de liberté que si l’on abandonne l’idée qu’il existe des dessins “beaux” et d’autres “moches”, ou qu’il faut absolument être Frida Kahlo ou Niki de Saint Phalle pour pouvoir dessiner. L’important, c’est le message et sa transmission ; tout le reste est subjectif. Réussir à poser sur le papier ce que l’on veut dire sans utiliser les mots est un exercice délicat. Dans ces moments, c’est la beauté du geste qui compte plus que celle de l’œuvre elle-même. Se faire comprendre sans langage écrit, sans mobiliser de symboles surutilisés — souvent porteurs de stéréotypes — est d’autant plus difficile quand on n’a pas la souplesse d’esprit des plus jeunes. Il faut donc du courage pour se lancer… et accepter d’échouer. 

À côté de ces échanges, celles et ceux qui le souhaitaient ont pu s’installer pour découvrir une BD de notre bibliothèque. Tous les ouvrages présents ce jour-là avaient été soigneusement sélectionnés par notre équipe et par Céline, fondatrice de la librairie L’Inopinée à Lausanne. Ensemble, nous avions rassemblé de petites merveilles qui défient, par les histoires qu’elles racontent et les dessins qu’elles présentent, les stéréotypes de genre. Certain·e·s étaient destinés aux tout-petit·e·s et d’autres aux plus grand·e·s. 

Que ce soit au travers d’un exercice collectif de pensée et de dessin, ou bien lors d’un moment individuel de lecture ou de création, la cinquantaine de personnes présentes à l’atelier a pu se questionner sur les stéréotypes de genre. Pour les plus jeunes, c’était aussi l’occasion de mieux comprendre la journée du 14 juin et sa signification. Pour les plus âgé·e·s, ce fut un moment d’apprentissage intergénérationnel, où l’adulte perd son rôle de “celui qui sait” pour devenir “celui qui apprend”. 

Merci à tou·te·s les participant·e·s d’avoir dessiné, partagé et échangé avec nous autour des questions de stéréotypes de genre. Merci à la librairie L’Inopinée, et particulièrement à Céline, de nous avoir guidé·e·s vers des ouvrages pertinents et inspirants. Merci à Catherine Nachbar d’avoir mis à disposition son expérience d’illustratrice au service de l’atelier. Enfin, nous remercions chaleureusement le Bureau de l’égalité de la Ville de Lausanne pour sa participation au financement de ce projet. 

On espère vous croiser au coin d’une rue, sur l’un de nos stands ou sur nos réseaux sociaux, pour un échange sur le genre, les masculinités et tous nos sujets préférés.